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Archive for octobre 2009

La poudre magique, qui donne aux plats une couleur d’été au soleil et aux papilles un parfum de bonheur, est la grande patience de l’automne. Les rangs de crocus sativus, s’ils sont dans une terre qui leur convient -argilo-calcaire allégée au sable et bien drainée-, sont capables de donner des poignées de fleurs à chaque pied, et cela à rythme effréné. Il faut passer chaque jour entre les rangs, prélever délicatement les fleurs et passer du temps à les nettoyer une fois rentrées du jardins.

beauté pure

Trois grands filaments orange pendent de la fleur. C'est la partie aérienne du pistil

Les trois filaments de safran recueillis dans chaque fleur (si les limaces n’y ont pas goûté) sont en fait l’extrêmité du pistil. Séchés quelques jours à l’air sour une cloche à fromage grillagée, ils sont ensuite à concerver dans un pot bien hermétique.

le carré magique

Les rangs, bien serrés, ouvrent chaque jours leurs fleurs au pistil si recherché

Mais quel bonheur, ensuite, d’offrir à ses amis des figues rôties au safran du jardin ou de parsemer les risottos de l’hiver de brindilles dorées. Et puis, la fleur est si jolie avec ses meurtrissures de colchique veinée de bleu.

gros plan

Un concentré de parfum, adoré des abeilles et des bourdons aussi : les étamines sentent le miel.

récolte d'octobre

Octobre offre des saveurs rares, surtout s'il est ensoleillé

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A peine installées sur les rayonnages du fruitier, les pommes commencent leur migrations. La plupart s’installent dans le calme, au cœur de cette bibliothèque silencieuse qui sent le fruit à pleine goulée, à grandes respirations. Elles y somnolent sans bouger, parfois saccagées par le passage d’une souris.

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Un regard dans un océan de noir

D’autres entament une curieuse mutation. A la recherche d’une vie foisonnante, pastillée de couleurs sombres, de matières nouvelles. Les pommes font leur mutation, dans le rouille, le plus souvent, avec des barbes et des ocellés de moisi. Dans le noir, plus rarement, dévolue à la matière cuir, bravement lustrées et craquelées comme un vieux sac de voyage. Pour ouvrir un œil rond, plongé dans un océan de noir intense.

Plus tout à fait fruit, pas encore abîmées, elles semblent oublier leur chair croquante pour se concentrer exclusivement à leur emballage. Peau tannée, entre cuir et pierre de silex, entre marbre poli et bronze, elles inventent des coloris de bleu en surface de leur cuvette. Autour de l’étoile résidus d’étamines, un éparpillement d’astres.

Et plus rien ne bouge alors. Elles peuvent rester ainsi, en attente, des semaines, sans se friper, sans passer par la phase molle de leurs compagnes plus classiques. Sans froisser leur peau en y creusant des ravines.

Les petites chéries noires, marron de pourriture, rouille de fer mouillé, barbues et bubonantes, exposent leurs singularité au su de tous. Comme une peuplade étrangère, très calmement à l’ombre du cellier.

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Avec des peaux tannées comme les cuirs d'une ancienne malle

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Ocelées, grignotées, déjà usées par les premières pluies

 

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Offrant leurs bubons aux regards dans des écrins de cuir.

Les pommes qui refusent de devenir réserves, qui n’envisagent pas le prélèvement des goûters, des compotes et des tartes d’hiver, toutes celles qui ne rêvent pas de devenir tatin, choisissent la voie rétractée. Elles se posent en objet, le temps d’un décor, comme regret le temps d’un symbole.

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Qui a dit que cette saison était triste? Elle est juste rare, étonnante avec ses couleurs de mauves, de vieux tissus précieux, de bonbons anglais acidulés qui bariolent le rose et l’orange. Elle est fine et bravache à la fois, douce et mordante d’un même geste. Elle nous accompagne au jardin avec des pas menus de souris qui fait la nique aux ombres grises. Avec des odeurs de macérations, de feuilles qui s’agglutinent en senteurs de buis et genets, de pommes noircies aux bubons généreux.

Qui a dit que c’était le temps d’une fin? Sous ses fanfreluches vineuses, avec ses orgues marins qui pendent leurs tuyaux au bord du toit, avec ses doigts roses agrippés à la pierre et aux derniers soleils, elle vend bien sa mise en scène. L’ardoise grise est luisante, le tuffeau chavire sous la pluie, mais elle, en secret, rit des richesses qu’elle prépare à la terre.

La vigne-vierge, des orgues sous la mer

La vigne-vierge, des orgues sous la mer

Qui aurait l’audace de penser la saison mourante? Hier, elle déployait ses drapeaux à contre-ciel, fanfaronne. Elle flashait ses rouges d’écrevisse trop chauffée sur le tuffeau et sous une bande outremer de ciel. Elle osait ses paumes écartelées, pleines de doigts aux ongles aigus, rose indien tellement le soleil était bon. Involontaire, elle liait ses autres paysages, celui des hortensias après premiers gels matinaux et celui des betteraves au sang mêlé. Dedans, dehors, partout la même débauche de violets, de carmin de prune écrasée, de trop mûr presque noir. Même les petits penstemums, avec leurs bonnets d’elfes rassemblés en congrès, avaient perdu de leur éclat dans la grande braderie des couleurs poivrées.

Conférence de lutins près des penstemums

Conférence de lutins près des penstemums

Dans l'évier, mêmes harmonies du côté des légumes

Dans l'évier, mêmes harmonies du côté des légumes

Bonbons anglais pour l'hamamélis

L'hamamélis a des acides de bonbon anglais

Mouvement rose

En mains écartées, à l'assaut du tuffeau

Ouvrage de dame et vieux tissus

Vieux tissus précieux, variations en vert et rose, les hortensias brodent leurs drapés

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